Lente reprise du tourisme a Cuba

Lente reprise du tourisme a Cuba

LA HAVANE, 1 Oct. Oui, le tourisme reprend lentement à Cuba, mais il est loin d’atteindre les sommets d’avant la pandémie et les restrictions imposées par l’ex-président Trump, que l’actuel président démocrate Joe Biden n’a pas osé abroger. On le sait, le tourisme est un secteur de l’activité économique des plus importants sur l’île car l’apport en devises précieuses est presque immédiat et ne transite pas par des canaux que l’empire étatsunien peut intercepter en tout temps.

Ainsi, en seulement cinq mois, de janvier à mai 2022, plus d’un demi million de touristes ont visité Cuba, soit autant que pour toute l’année 2021. Mais c’est loin des chiffres des années d’avant la pandémie.

Ce retour progressif à la normalité ne signifie pas que des entreprises hôtelières étrangères, comme l’espagnole Melia, sont à l’abri de menaces de sanctions de la part de la Maison-Blanche. Celle-ci continue d’agir en maître du monde, sans que le monde qui lui est inféodé ne rouspète.

Tout se passe comme s’il était normal que l’empire étatsunien impose ses lois, même en dehors de ses frontières, à ceux qui osent défier l’embargo commercial et financier, ne serait-ce qu’en visitant tout simplement cette île des Antilles pendant une semaine ou deux. Du côté des médias, on observe le même silence.

La dernière surprise à ce chapitre, les Européens viennent de la découvrir. Si auparavant, Washington n’exigeait aux citoyens européens aucun visa pour entrer aux États-Unis — il suffisait seulement de remplir en ligne un document appelé « ESTA » (Electronic System for Travel Authorization), au coût d’une vingtaine de dollars —, ils devront désormais solliciter un visa d’entrée s’ils ont eu le « malheur » de visiter Cuba. Pourquoi ?

Parce que l’ex-président Trump, avant de quitter son poste, a pris soin d’inclure Cuba dans la liste des pays qui soutiennent le terrorisme.

Pourquoi ? Tout simplement parce que Cuba a refusé d’extrader, il y a quelques années, des délégués de la guérilla colombienne ELN qui s’étaient rendus à La Havane, en 2018, pour entreprendre des pourparlers de paix avec des représentants du gouvernement colombien de l’époque, sous l’égide d’un pays neutre, la Norvège.

Le nouveau président, Alvaro Uribe, avait mis fin aux discussions unilatéralement et avait ensuite exigé que le gouvernement cubain lui livre les négociateurs de la guérilla, ce que Cuba a refusé parce que l’entente signée entre les parties garantissait la sécurité de tout le monde.

Drôle de retour des choses : le nouveau président récemment élu en Colombie, Gustavo Petro, lui-même ancien guérillero, a décidé de reprendre les pourparlers de paix, avec les mêmes représentants à La Havane.

Inclure Cuba dans la liste des pays qui soutiennent le terrorisme n’est pas innocent. Cette mesure obscène pénalise les visiteurs, qui vont y penser deux fois avant de se rendre dans l’île, mais aussi et surtout les Cubains, qui sont déjà pénalisés par toutes sortes d’autres mesures restrictives.

Car, dans de telles conditions, quelle banque internationale veut négocier des lignes de crédit, par exemple, avec un pays classé dangereux ? Elle risque des amendes millionnaires et même de se faire enlever son code SWIFT. Quel gouvernement, quel entrepreneur privé oseront passer outre aux menaces étatsuniennes et faire affaires avec des entreprises cubaines ?

D’autres exemples récents ? La compagnie Airbnb vient d’être condamnée à payer une amende de 91 172,29$ pour avoir fourni ses services à des citoyens étatsuniens ayant voyagé à Cuba. La compagnie suisse Indosuez Switzerland a dû payer une amende de 720 000$ au département du Trésor étatsunien pour ne pas avoir respecté le blocus contre Cuba.

Ce ne sont que quelques exemples qui s’ajoutent aux menaces constantes qui planent contre les entreprises maritimes qui acceptent de transporter du pétrole vénézuélien à Cuba, même après le passage dévastateur de l’ouragan Ian sur les provinces occidentales de l’île.

Alors, quand j’entends le murmure public, ici et ailleurs, parler d’échec du gouvernement cubain, sans tenir compte du blocus ignoble et ses effets pervers, je me dis qu’il y a là une mauvaise foi évidente et un manque de décence.

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