La boxe menacée d’exclusion des JO: pour Cuba, le risque d’un KO

La boxe menacée d'exclusion des JO: pour Cuba, le risque d'un KO

LA HAVANE, 28 Nov. (AFP) La Havane – Surnommé « la sombra » (l’ombre) pour son art de l’esquive, le boxeur cubain Julio César La Cruz s’entraîne pour un objectif: Tokyo-2020. Mais ses efforts seront vains si le CIO exclut des Jeux olympiques la boxe, dont Cuba est la première puissance mondiale.


Ce sport « est celui qui a apporté le plus de médailles olympiques à Cuba« , explique le quadruple champion du monde et médaillé d’or à Rio-2016 (mi-lourds), au moment d’enfiler ses gants pour une compétition nationale où il défend les couleurs de sa province, Camagüey (centre).

« Ce serait un coup très dur pour la délégation cubaine de ne plus pouvoir compter sur les titres de la boxe » aux Jeux olympiques, s’inquiète le jeune homme de 29 ans, aux nombreuses dents en or.

Sur le ring, l’île caribéenne a longtemps été imbattable chez les amateurs, avec dans sa besace 73 titres mondiaux et 37 olympiques… même si elle a souffert de nombreuses désertions de boxeurs partis chercher ailleurs un meilleur avenir. Dernier en date: le double champion olympique Robeisy Ramirez, qui a abandonné en juillet la sélection lors d’un stage de préparation au Mexique.

Cette fois, la menace vient du Comité international olympique (CIO) lui-même, qui a perdu patience après le scandale des JO-2016 à Rio où l’intégralité des 36 officiels et arbitres de ce sport ont été suspendus après des accusations de combats truqués.

Les ombres d’un groupe d’enfants et de leur entraîneur de boxe à La Havane, le 12 novembre 2018 afp.com/YAMIL LAGE

Il a demandé des comptes à la Fédération internationale de boxe (AIBA) et se réunira les 30 novembre et 1er décembre à Tokyo pour décider s’il exclut ou non la boxe des prochains jeux.

Président depuis neuf ans de la Fédération cubaine de boxe, Alberto Puig se veut parfaitement serein: « Nous n’avons pas le moindre doute que la boxe va être présente aux Jeux olympiques » de 2020, assure-t-il à l’AFP.

Rentré il y a peu de Russie où il a participé au congrès de l’AIBA, il prend la défense de l’Ouzbek Gafur Rakhimov, élu président à cette occasion.

– « Comme une danse » –

L’homme d’affaires de 67 ans est pourtant accusé d’être un « criminel majeur » dans son pays par le Trésor américain, ce qui avait conduit le CIO à geler ses relations avec l’AIBA dès sa nomination comme président par intérim en janvier.

Rakhimov dément les accusations du Trésor américain. Début octobre, il avait assuré à l’AFP n’avoir « jamais été impliqué dans des organisations criminelles internationales« , dénonçant de « fausses allégations fabriquées par le précédent régime » en Ouzbékistan.

A la Fédération, « il y avait des problèmes historiques à la fois dans la gouvernance et dans les questions financières« , car « l’AIBA avait plus de 39 millions de dollars de dette, elle était en faillite totale et cela s’est réglé justement avec la gestion de Gafur et du reste de l’équipe avec qui nous travaillons au sein du Comité exécutif« , affirme Alberto Puig.

Pour Tokyo-2020, il garde jalousement ses pronostics – « c’est un peu secret« , dit-il – et indique seulement que l’objectif est « d’augmenter le nombre de médailles des JO de Rio« , où Cuba avait décroché trois médailles d’or et trois de bronze.

Aux boxeurs de l’équipe nationale qui s’inquiètent, Rolando Acebal, leur entraîneur national, répète la même chose: « calmez-vous, ne vous inquiétez pas car ça va se régler« .

Pour lui aussi, il est « impensable » que la boxe sorte des JO, car c’est « l’un des sports les plus anciens de l’histoire« , la discipline étant un des six sports originels des Jeux olympiques antiques.

Fier que la boxe soit « le navire-amiral du sport cubain« , il rappelle que Cuba reste une référence dans le monde de la boxe et que, régulièrement, des sportifs étrangers viennent s’y entraîner. Récemment, l’île a ainsi accueilli en stage l’équipe olympique allemande.

« Tout le monde veut se préparer avec les Cubains car nous avons un mélange de styles européen et américain, avec beaucoup de coordination. La boxe, nous la pratiquons comme une danse« , confie l’entraîneur, espérant que l’heure de la fin du bal n’a pas sonné.